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J'écris mes 1ers jets à la main

(Et ça a changé ma vie !)


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Je pense que c'est le conseil d'écriture que j'ai le plus donné aux auteur'ices. Je ne peux pas m'empêcher, lorsque je lis des histoires de blocage, de syndrome de la page blanche, de proposer de changer de support. Parfois, un simple changement de logiciel peut redémarrer la matrice. Bien sûr, ce n'est pas LA solution miracle, loin de convenir à tout le monde, et souvent, le problème est plus profond (ou il s'agit d'un blocage psychologique ou d'un problème lié à l'intrigue du roman). Cependant, changer son support d'écriture peut avoir de véritables bienfaits.


Quand j'ai commencé à écrire il y a quinze ans, je n'avais pas forcément accès à un PC en permanence (un seul ordinateur pour toute la famille, temps d'écran limité...). J'écrivais essentiellement sur des feuilles à carreaux et dans des cahiers de brouillon. Alors oui, c'était l'époque où je ne savais pas écrire (du tout), où je ne me prenais pas la tête, manquais de maturité, bref. Mais c'est dans ces conditions que j'ai été frappée par la passion de l'écriture.


Lorsque j'ai eu un ordinateur personnel, je suis évidemment passée de mes vieux cahiers de brouillons à WordPad (oui, WordPad, pas Microsoft Word). S'ensuivent quelques années d'écriture, puis Word, puis des logiciels comme WriteControl, Scribbook ou encore NovelPad (je n'ai jamais utilisé Scrivener, je fais partie d'une minorité d'auteur'ices qui n'ont jamais touché à ce logiciel).


Donc, j'ai continué à écrire sur des logiciels de rédaction.


Et puis d'un coup, comme ça, lors de l'écriture du 1er jet de Crepusculum (mon prochain roman d'urban fantasy, toujours en cours), énorme blocage. Grosse panique. Plus capable d'aligner deux mots sur le clavier. Vraiment, plus rien. Je pense que cela est dû en partie à ce qui se passait dans vie à ce moment-là (on a pris la décision de fermer les Editions Onyx, ce qui nous a laissées, ma collègue et moi, en dépression). On est au début du mois de novembre, en plein NaNoWriMo. Et rien ne sort de mes petits doigts. La sensation est terrible, cette incapacité à écrire, physique et psychologique, même une phrase.

Je regarde ma bibliothèque de carnets, vides pour la plupart (certain'es collectionnent les verres Coca-Cola, d'autres les couvercles de boîtes de camembert (sans déconner, vous n'êtes jamais allés chez mes grands-parents...), d'autres collectionnent les carnets). Je me saisis d'un cahier et d'un stylo. J'écris la dernière phrase rédigée sur mon PC pour avoir le contexte, le résumé du chapitre affiché sur l'écran, et c'est parti.


Quand je vous dis que ça a changé ma vie, c'est que ça a changé ma vie. Et ma façon de voir et d'aborder l'écriture.

J'écris, vraiment. Je pense chaque mot que je couche sur le papier avec mon écriture qui change de style à chaque ligne (j'ai une écriture manuscrit très irrégulière, pourtant, je vous jure que je suis allée en maternelle). Je ne vous mens pas, la sensation est complètement différente de quand j'écris au clavier. Comme si le cerveau avait un interrupteur pour modifier son mode de réflexion et de fonctionnement. Je ne réfléchis pas de la même façon avec un stylo qu'avec un clavier.


Oui, l'écriture manuscrite est beaucoup plus lente, mais justement, c'est là précisément que la magie opère !

Quand on écrit sur un clavier, on prend moins le temps de réfléchir à notre pensée, au choix des mots. C'est très rapide, peut-être même instinctif. On peut aussi très facilement revenir en arrière, supprimer une phrase, recommencer, ou même effacer des scènes entières en deux clics. Vous avez essayé de faire la même chose dans votre carnet ? Bah figurez-vous que ce n'est pas possible.

Quand on écrit à la main, on a le temps de sélectionner chaque mot, sans avoir écrit le précédent. Je me demande (et il faudrait que je me renseigne à ce sujet) si l'on n'utilise pas une "fonction" différente de notre cerveau en écriture manuscrite. Je pense sincèrement que ma façon de réfléchir est complètement différente dans ce cas de figure. Je m'arrête plus souvent pour choisir la meilleure tournure de phrase, le meilleur terme pour exprimer un ressenti, le meilleur adjectif pour décrire la texture d'un rideau (bon, je pousse un petit peu). Bien sûr, il n'empêche que ça reste un 1er jet dans lequel il va manquer beaucoup (beaucoup) de choses et c'est absolument normal.

Mais, il y a vraiment quelque chose de différent à écrire à la main.

Quand j'écris à la main, je ne peux pas revenir en arrière, supprimer des paragraphes entiers en quelques secondes et tout recommencer. Ecrire à la main me force à avancer sans regarder en arrière. Et si jamais l'envie me prend, j'annote mon carnet. Je ne me prends plus la tête. Ca aussi, ça a changé. J'ai arrêté de passer des heures à me torturer l'esprit sur un élément de l'intrigue qui ne s'emboite pas où une incohérence. J'écris ma bêtise, je me laisse une note pour la réécriture (la réécriture, pas la retranscription), et je continue sans me soucier des problèmes de la future Elyséa qui relira ce 1er jet et qui sera reconnaissante à la Elyséa du passé qui a laissé une annotation pour ne pas oublier.

Là où la magie redouble, c'est lors de la (très longue) retranscription sur PC. Je réécris chaque mot, et en plus, j'en profite déjà pour améliorer mon texte. Ce n'est pas une réécriture, c'est juste une correction du 1er jet. Une tournure de phrase, une répétition, un verbe terne qu'on peut faire sauter.


Alors moi, je t'encourage à essayer d'écrire à la main. Un paragraphe, uns scène, un chapitre entier, peut-être. Parce que c'est incroyablement fun (même si ça fait mal au poignet !)



J'ai essayé plusieurs de retourner sur mon PC pour continuer ce 1er jet, mais rien à faire. Je suis bien incapable d'écrire quelque chose de satisfaisant avec un clavier. Je réalise que le blocage s'est inversé. (Oups.)


Ce roman se poursuivra donc à la main, entre les pages de mon carnet, mon stylo plume et mon cerveau dysfonctionnel.

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